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DEVOIRS DE VACANCES : 1. THE FASTEST GUN ALIVE (La première balle tue), de Russell Rouse (1956)

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LA PREMIÈRE BALLE TUE s'inscrit dans une période charnière de l'histoire du western psychologique. À défaut d'être un chef-d'œuvre, ce petit film "révisionniste" mérite le détour. On y trouve à la fois des échos de THE GUNFIGHTER (La Cible humaine) d'Henry King (1950) et HIGH NOON (Le Train sifflera trois fois) de Fred Zinnemann (1952) et une réflexion sur mythe et vérité, héroïsme et imposture qui anticipe de six ans L'HOMME QUI TUA LIBERTY VALANCE.

Commençons par "l'héritage" GUNFIGHTER. L'austère et remarquable film de King fut sans doute le premier à autopsier le personnage du tireur d'élite, à le dépouiller méthodiquement de son aura et à en montrer l'irrémédiable solitude. Gregory Peck y incarnait Jimmie Ringo, un homme stoïque, au bout du rouleau, poursuivi par sa réputation, et obligé d'affronter dans chaque ville de jeunes crétins surexcités avide de se mesurer à lui. Son tragique destin se jouait en quelques heures, entre un saloon, une chambre et la grand-rue emblématique d'une bourgade anonyme, où il tomberait sous les balles d'un petit minable. La malédiction continuait, car à la fin du film, "l'homme qui a tué Jimmie Ringo" devenait à son tour la cible privilégiée de dizaines d'autres candidats à la gloire.

De HIGH NOON, le film de Rouse reprend l'idée classique de la petite ville assiégée par une bande, et dont le salut dépend tout entier du courage d'un homme. Chez Zinnemann, le shérif Kane (Gary Cooper) se révèle incapable d'accomplir seul cette mission. Il sollicite en vain le concours de la population, et voit ses concitoyens se dérober un à un. La menace expose les failles intimes d'un héros trop humain, légitimement tenté de fuir une situation désespérée, mais révèle, surtout, l'égoïsme et la passivité d'une société où la solidarité est devenue un mot vide de sens. (Le film est un apologue transparent sur les réactions d'Hollywood à l'hystérie maccarthyste.)

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LA PREMIÈRE BALLE TUE associe les axes GUNFIGHTER et HIGH NOON (moins la dimension politique) au portrait d'un homme dont nous découvrirons la véritable personnalité en trois étapes finement agencées. Il y est à la fois question du poids écrasant de la réputation, des exorbitantes demandes que la société adresse à ses "héros", et des dilemmes d'un homme confronté à sa "gloire" usurpée, à ses échecs passés et à sa propre capacité de résistance.

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L'histoire de George Temple (Glenn Ford) est celle d'un quidam ordinaire érigé malgré lui en sauveur. Dans un premier temps, Temple apparaît aux yeux des habitants de Cross Creek comme un loser. Simple boutiquier, il ne connaît pas les "rudes bonheur" qui sont l'apanage des ranchers. On le regarde avec condescendance du fait qu'il ne porte pas d'arme et ne boit pas d'alcool. On sous-entend même qu'il manque de virilité (thème courant des années cinquante : souvenons-nous seulement de la crise de nerfs de James Dean lorsqu'il voit son père faire la vaisselle dans LA FUREUR DE VIVRE.)

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Deuxième étape : George Temple, excédé, confond les ricaneurs en leur prouvant sa phénoménale habileté au tir. D'un instant à l'autre, le voilà promu "tireur le plus rapide de l'Ouest" et porté en triomphe par une population aussi crédule que versatile.

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Pendant ce temps, un autre tireur, le hors-la-loi Vinnie Harold (Broderick Crawford), qui préserve jalousement sa réputation de "fastest gun alive", fait route vers Cross Creek avec deux complices...

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Troisième acte : Après avoir dévalisé la banque, Harold aprpend de la bouche d'un gamin qu'il a un rival sur place. Il exige que celui-ci l'affronte d'homme à homme, sous peine de réduire Cross Creek en cendres.

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Ses nouveaux "amis" pressent George de relever le défi. Coup de théâtre : Le tireur est contraint d'avouer qu'il n'a, de sa vie, jamais tiré sur un homme. Les six encoches faites sur la crosse de son pistolet sont un leurre - l'arme appartenait à son père, shérif, dont il n'eut pas le courage de venger le meurtre. Cette défaillance l'a condamné à un remords sans fin, à une vie errante que sa femme, Dora (Jeanne Crain), ne supporte plus - une vie où George s'interdit de se servir réellement de l'arme paternelle, dissimule honteusement celle-ci et se borne au plaisir solitaire de s'exercer en cachette. (Le film joue ouvertement sur la symbolique freudienne de l'arme et la dimension œdipienne du conflit.) Le défi incontournable que lui lance Harold va permettre à Temple de se racheter, de tuer le Père et d'enterrer définitivement l'arme dans une tombe à son propre nom. La population, reconnaissante, se fera complice de cette mystification, qui permettra à George d'entamer une nouvelle vie avec Dora.

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Rendons à Frank D. Gilroy...

Le scénario de LA PREMIÈRE BALLE TUE porte la double signature de son réalisateur, Russell Rouse, et de Frank D. Gilroy, également crédité comme auteur de l'histoire originale, "The Last Notch" (La dernière encoche). Celle-ci avait été tournée une première fois à la télévision en 1954, dans le cadre de la collection "The United States Steel Hour". Imdb ne donne pas le nom du réalisateur de cet épisode et fournit un casting réduit, incluant Jeff Morrow (dans le rôle de George Temple), Louisa Horton (Dora) et Richard Jaeckel (Vinnie Harold). La source littéraire de "The Last Notch" serait, selon Imdb, le roman du "Doyen des Lettres Américaines" William Dean Howells "The Laphams of Boston".

Gilroy, futur lauréat du Pulitzer pour le drame psychologique "The Subject Was Roses", trouva sans doute la thématique du vrai/faux héros assez riche pour y revenir par deux fois : dans un savoureux roman western, "For Want of a Horse", paru en 1974, et, l'année suivante, dans l'adaptation qu'il en tira et qu'il réalisa lui-même sous le titre FROM NOON TILL THREE (C'est arrivé entre midi et trois heures), avec Charles Bronson et Jill Ireland. Inédit en DVD, ce film sophistiqué et inclassable tient à la fois du pastiche, de la comédie et de l'anti-épopée. Comme LA PREMIÈRE BALLE TUE, mais sur un ton d'une grinçante ironie, c'est une parabole sur l'usurpation d'identité, les mythes de l'Ouest, la pression sociale, l'image de soi, les paradoxes et les contraintes de l'héroïsme. On y voit un vrai lâche, dépassé par sa légende héroïque, lutter pour rétablir la vérité sur lui-même et finir par sombrer dans la folie faute de rencontrer la moindre écoute. "Print the legend" est-il dit à la fin de LIBERTY VALANCE. L'histoire du cinéma a retenu cette formule ironique et désenchantée comme appartenant de plein droit à John Ford ; Frank D. Gilroy aurait aisément pu en revendiquer la priorité avec sa PREMIÈRE BALLE TUE...

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